Musique

La Vie devant nous, création 2021

Le nouveau spectacle des Betty Blues, alias Alice Amanieu et Marie Gambaro, est plus qu’un spectacle : c’est une occasion de grandir même – et en particulier – pour ceux qui sont déjà adultes. La vie devant nous est un spectacle au sujet sérieux et à la réalisation édifiante, c’est aussi une composition jubilatoire et pleine de fantaisie pour vivre un bon moment, ensemble.

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Alice Amanieu et Marie Gambaro ont passé les vacances de printemps au Bois fleuri, invitées en résidence artistique par la Ville de Lormont. Elles y ont peaufiné la « version rue » de leur spectacle La vie devant nous, spectacle dont elles avaient présenté la version scène en janvier, également sur les planches de l’Espace culturel. « Nous avons une semaine pour raccourcir la version scène qui dure une heure vingt à tout juste une heure, explique Alice. Une heure, c’est la bonne durée pour un spectacle de rue ».

« L’intérêt d’une résidence, surtout en ce moment, c’est de pouvoir travailler dans un lieu adapté, poursuit Marie. Ça nous fait du bien d’être accueillies, de profiter de l’énergie du plateau. On peut travailler un peu la musique chez nous ou ailleurs, bien sûr, mais une bonne partie du travail ne peut se faire qu’au milieu de notre décor, décor qu’on ne peut vraiment déployer que sur une scène comme ici au Bois fleuri ».

L’enfance, une cause à défendre par humour

Pour leur nouveau spectacle, Alice et Marie ont choisi de travailler autour des problématiques de la perception de l’enfance et de la communication intergénérationnelle. Pourquoi ? « Parce que nous sommes une compagnie qui entend changer le monde !, revendique Marie, mi-blagueuse, mi-sérieuse. Nous essayons d’abord de faire des spectacles qui permettent aux gens de se retrouver. Or notre point commun à tous est d’avoir été, un jour, des enfants ». Alice explique : « Nous sommes parties de la vision du monde des adultes telle que nous l’avions quand nous étions enfants, du regard que nous portons sur notre enfance maintenant que nous sommes adultes, de la manière dont on considère généralement les enfants. Le tout s’ouvre sur la possibilité d’un monde meilleur pour les enfants d’aujourd’hui qui seront les adultes de demain… »

Enfants, le monde des adultes nous paraissait bizarroïde.
Adultes, notre enfance a le goût d’une madeleine trempée
dans un doux café au lait par un matin d’hiver
bercé par le crépitement d’un feu de cheminée.
Ou pas.

L’enjeu est grand et le défi élevé. Pour réaliser ce spectacle très documenté, Alice et Marie sont allées chercher du contenu bien au-delà de leurs seuls souvenir personnels.

« Nous avons lu les livres d’Alice Miller et de Catherine Gueguen, nous avons travaillé avec une sociologue. Nous avons aussi animé des ateliers philo, des ateliers théâtre d’expression, des sorties de résidences suivies de discussions avec le public pour voir ce qui résonnait ou pas, énumère Alice. C’est ainsi que nous avons nourri nos personnages et créé le contenu du spectacle ».

« Nous avons fait beaucoup de médiation, confirme Marie. Nous avons rencontré des gens qui ont des enfants, qui travaillent avec des enfants et bien sûr tout simplement qui ont été des enfants. En confrontant leurs souvenirs et leur perception du monde actuel, nous avons perçu un grand un décalage.

« Tout l’enjeu était de rentrer beaucoup de contenu dans le spectacle tout en restant accessible et drôle, précise Alice. C’est un spectacle, pas une conférence ! Même si nous sommes aussi allées chercher dans les sciences neuro-affectives pour un petit sketch sur le fonctionnement du cerveau, pour montrer que ça ne fonctionne pas dans la tête d’un enfant comme dans la tête d’un adulte, ça reste un sketch, et ça doit être amusant ».

Les milles et une choses
que nous avons vécues et partagées
font de nous la personne
que nous sommes aujourd’hui.
Nous devenons de grands arbres
avec des racines d’enfant.

Betty Blues

« Comment on nous parle, comment on nous accueille dans ce monde, à quoi sommes-nous conditionnés ? » problématise Marie. « Souvent, on ne considère pas les enfants comme des êtres à part entière. Pour preuve, le verbe infantiliser. Quand on se plaint d’être infantilisé, on se plaint d’être considéré comme quantité négligeable. Le besoin d’être considéré et respecté des adultes vient de leurs blessures d’enfance. Ces petites violences ordinaires qu’on a tous vécues, et qu’on reproduit plus ou moins dans l’éducation, ont des répercussions dans tous les aspects de notre vie ». Militante, Marie ajoute : « Imaginons un monde où on apprendrait à accueillir nos émotions, à se respecter les uns les autres, à trouver des terrains d’entente… Des solutions pour y arriver, on en a trouvées quelques-unes. Elles sont dans le spectacle. Il faut venir le voir !»

« Pour autant, nous ne donnons pas de leçons, nous ne faisons pas la morale, insiste Alice. Nous sommes tous constitués de failles. Nous reproduisons malgré nous, de mauvais comportements sans être malveillants pour autant. Il n’est donc pas question d’être jugeant ou culpabilisants. Pour éviter cet écueil, nous avons nos outils magiques : l’humour et la chanson ! ». Ne dit-on pas de la comédie qu’elle « corrige les mœurs en riant » ?

 

Un spectacle à découvrir bientôt (enfin!)

Alice et Marie ont fait leur première représentation en janvier sans public. Puis toutes leurs dates de l’hiver et du printemps ont été annulées ou reportées sine die. «  Mais on garde espoir ! assurent les deux comédiennes. On a notamment deux dates à Lormont cet été, pour la version rue, puis neuf dates en octobre au Café des Beaux-arts à Bordeaux, pour la version salle »

 

« Une sortie de résidence était prévue devant les enfants du centre de loisirs, indique Lucille Meziat, chargée de programmation et présence artistique à l’Espace culturel du Bois fleuri. Ce type de représentation était autorisé jusque récemment mais ne l’est plus depuis le reconfinement.

Au mieux, nous pouvons maintenir une représentation uniquement entre professionnels du spectacle: autres comédiens et musiciens qui peuvent apporter un regard extérieur, programmateurs de salles susceptibles d’accueillir le spectacle par la suite, éventuellement représentants de la cité éducative, ce spectacle devant être exploité par la suite dans ce cadre ».

Outre la représentation professionnelle, deux représentations sont prévues à Lormont. La première, le 7 juillet, certainement au Bois fleuri, sera ouverte grand public (sous réserve de la situation sanitaire). Elle devrait profiter également aussi aux enfants qui participeront aux « Vacances apprenantes » organisées par la Mairie.

L’autre représentation, le 31 août (encore à confirmer) devrait bénéficier aux animateurs des temps d’activités périscolaires et aux personnels de services de la Ville. « Au moment de la rentrée, ce sera l’occasion pour les concernés de renouer avec le travail mené précédemment autour des émotions », souligne Lucille.

Sans diplôme, sans expérience, sans pouvoir politique,
les enfants peuvent être moteurs de changement.
Par le regard neuf qu’ils portent sur le monde, par leurs révoltes,
leurs incompréhensions, leurs rêves, leur naïveté,
ils portent en eux l’espoir d’un avenir meilleur.

« Quand j’ai rencontré la compagnie Betty Blues avant que le spectacle ne soit créé, j’ai souhaité pouvoir l’accueillir à Lormont en résidence artistique, se souvient Lucille. Je voulais l’inscrire dans notre programmation jeune public, bien que les Betty Blues ne le considèrent pas comme un spectacle jeune public. C’est en fait un spectacle pour tous les publics à partir de 8 ans ».

Ce projet est arrivé au moment où la Ville venait d’obtenir le label Cité éducative. « Quand nous avons vu l’ébauche de ce spectacle, en janvier, la résonance avec la Cité éducative nous est apparu encore plus forte » argumente Lucille. Une grosse partie du spectacle s’intéresse à la manière dont on communique, entre enfants et parents. Il aborde les enjeux de la communication non violente et les mécanismes des orages émotionnels y compris dans leurs aspects neurologiques.

Le spectacle montre aussi comment aborder les problèmes différemment afin que les situations se calment plus vite.

Entre passé et futur,
“La Vie devant Nous” est une proposition
pour penser le monde d’aujourd’hui
avec les enfants d’hier et les adultes de demain.

« Cela m’a semblé très intéressant, analyse Lucille, pour les parents que nous sommes, pour les enfants eux-mêmes et aussi pour tous les adultes qui travaillent auprès les enfants : les enseignants, les animateurs, les personnels de service… Les professionnels qui ont déjà vu ce spectacle l’ont trouvé passionnant. Qui plus est, les comédiennes-musiciennes sont excellentes, le spectacle est drôle, émouvant entraînant. La pièce s’achève sur une reprise de la Marseillaise dont Betty Blues a changé les paroles, en remplaçant les formules guerrières par des mots bienveillants. Un exercice risqué mais, en l’occurrence, très réussi ».

La vie devant nous,
de et par Alice Amanieu et Marie Gambaro
avec Alice Amanieu : écriture, jeu, chant, piano, accordéon, mélodica.
et Marie Gambaro : écriture, jeu, chant, guitare, clavier, guitalélé, ukulélé.
Regards complices : Marie-Magdeleine Sommier et Antoine Boulin
Création sonore : N'Dembo Ziavoula
Oreille complice  : Manu Martin
Scénographie : Cécile Lena et Marc Valladon
Costumes : Hervé Poeydomenge

Spectacle accueilli en résidence par Acrocs Production et la Commune de Targon, le Service culturel de Lormont, l'Espace Treulon à Bruges, le Service culturel d’Hendaye, La Caravelle de Marcheprime, le Service culturel de Villenave d’Ornon, le service culturel de la ville de St Paul les Dax, le service culturel de la ville de Tresses, le théâtre Spirale de Riscle. Coproduction : Villes d'Hendaye et de Saint-Paul les Dax, Iddac agence culturelle du département de la Gironde, spectacle soutenu par l'OARA office artistique de la Région Aquitaine et par la ville de Bordeaux.